Covid-19 et reprise du travail sur les chantiers : 4 étapes pour se préparer

Depuis le début du confinement imposé pour lutter contre le Covid-19, les entreprises du BTP ont stoppé en grande majorité leur activité et on estime aujourd’hui que 80% des chantiers sont à l’arrêt. L’activité économique doit pourtant reprendre, il en va de la survie de la plupart de nos entreprises du BTP. Mais une fois le déconfinement entamé, comment concilier reprise du travail sur les chantiers, santé pour les salariés exposés et sécurité de l’employeur ? SECOIAM vous propose 4 étapes clés.

La situation en France

17 920 morts suite au Covid-19, voilà le nombre des décès en France arrêté au 16 avril 2020 d’après Santé Publique France. La maladie, provoquée par l’exposition au nouveau Coronavirus (SARS-CoV2), touche de manière intensive la France depuis mi-mars. Si pour la plupart des cas (80%) les symptômes sont très faibles voire inexistants, le Covid-19 est responsable de pneumopathies, qui peuvent être sévères et engendrées une grande détresse respiratoire.

Pour faire face à cette pandémie, le Président de la République a décidé la mise en place du confinement depuis le 17 mars, et plus récemment parlé d’un déconfinement progressif à partir du 11 mai. Il n’en demeure pas moins que le Covid-19 sera encore présent, et la reprise du travail dans des conditions sanitaires acceptables sera problématique.

Quatre étapes clés pour préparer la reprise du travail sur les chantiers

  • Bien évaluer les risques et organiser votre entreprise
  • Planifier la reprise des chantiers
  • Appliquer les mesures de sécurité
  • Former et contrôler vos collaborateurs

1) Bien évaluer les risques et organiser votre entreprise

Comme vous devez le savoir, les entreprises ont une obligation d’élaborer un document unique d’évaluation des risques professionnels depuis 2001. Celui-ci est le document de prévention par excellence.

Dans votre DUER, vous devrez :

  • Identifier les situations de travail dans lesquels il peut y avoir un risque d’être atteint par le Covid-19
  • Évaluer le niveau du risque par rapport à la gravité et la fréquence

Ensuite, vous viendrez pondérer le risque en évaluant la qualité de la prévention existante et en enregistrant les incidents / accidents qui se sont produits. On espère que ça ne sera pas le cas, mais mieux vaut prévenir que guérir, surtout qu’ici, il n’y a pas de traitement. Il est donc important de bien penser vos mesures de prévention.

Voici un petit rappel : pour qu’il y ait un dommage (ici, le fait d’être atteint du Covid-19), il faut la combinaison d’un danger (ici, le nouveau Coronavirus) avec une exposition (ici, le fait d’être en contact avec une personne porteuse du Covid-19) et un événement déclencheur (ici, la transmission du virus).

Si l’on agit sur l’un des facteurs de « l’équation », on évite le dommage. Par exemple, en arrêtant les chantiers « non nécessaires » ou en travaillant de manière « isolée », c’est-à-dire en respectant une distanciation sociale, on diminue l’exposition. L’événement déclencheur peut être évité par les gestes barrières.

Il faudra mettre en place des mesures à la fois sur les plans humain, organisationnel et technique.

Une fois le Document Unique mis à jour, n’oubliez pas de réaliser un Plan de Continuité d’Activité, il viendra en complément du premier. Là encore, le PCA n’est pas spécifique au Covid-19 mais il est tout à fait adapté, puisque c’est un outil pour prévoir, anticiper les actions à mener en cas d’événement perturbateur lors d’une crise majeure quelque soit l’origine. Il s’agit donc d’un document plus opérationnel, permettant d’écrire l’organisation que vous mettez en place.

Il répond à des questions simples, comme :

  • Quelles sont les activités indispensables ?
  • Lesquelles peuvent être interrompues ?
  • Comment mobiliser les ressources pour les réaliser ? Comment gérer l’absentéisme dû au Covid-19 ?
  • Comment communiquer avec mes clients ? Mes salariés ?
  • Comment se faire livrer le matériel et les équipements nécessaires ? En particulier, comment s’approvisionner en gel hydroalcoolique, en masques, gants pour faire face aux besoins quotidiens ?
  • Comment reprendre l’activité une fois la situation de crise gérée ?

N’oubliez pas d’impliquer et de consulter les représentants du personnel dans ces étapes !

2) Planifier la reprise des chantiers

Comme pour tout chantier, cette étape est primordiale ! Un chantier bien préparé sera un chantier bien réalisé.

C’est là qu’entre en scène le Maître d’ouvrage, accompagné de l’équipe de maîtrise d’œuvre. C’est le donneur d’ordre en premier lieu qui réalise l’évaluation des risques sur le chantier. Dans le cas présent, il va devoir établir un état de lieux pour vérifier que les conditions sanitaires sont adaptées à la reprise. Il peut notamment se poser les questions suivantes :

  • Quelles entreprises sont susceptibles de reprendre le travail ?
  • Dans quels délais ? Selon quel planning ?
  • Avec combien de personnes ?
  • Pour quelles interventions ?
  • Surtout, avec quel risque de coactivité ?
  • La base vie est-elle adéquate ?
  • Avec quels sous-traitants ? Quels fournisseurs ? Est-ce que l’ensemble de la chaîne est prête ?
  • Dans quelles conditions d’interventions intérieures et extérieures ?

Il pourra faire appel à un référent Covid-19 pour l’accompagner dans sa démarche. Toutefois, notons que la responsabilité de reprendre l’activité sur chantier ou non revient aux entreprises. Le maître d’ouvrage ne pourra l’imposer.

Dès lors qu’il y a une mission de coordination SPS, le coordonnateur devra mettre à jour le Plan Général de Coordination, en limitant autant que faire se peut la coactivité et en privilégiant éventuellement la succession des entreprises (plutôt que la présence simultanée). Pour les opérations de première catégorie, il y a obligation à organisation un CISSCT avant la reprise.

Cette étape permettra par exemple :

  • De revoir le plan d’installation de chantier, en organisant les flux de circulations de façon à éviter de se croiser, les zones de stockage (pour organiser les livraisons en limitant les contacts), etc.
  • D’adapter les installations d’accueil, les vestiaires et les sanitaires

Le coordonnateur SPS vérifiera également la compatibilité des PPSPS de chacun des intervenants.

Enfin, le maître d’œuvre va mettre à jour le planning prévisionnel des travaux, suite à l’impact des mesures d’organisation.

À cette étape, il est important de ne pas oublier les autres risques :le nouveau Coronavirus n’a pas supprimé les risques habituels et le fait d’avoir interrompu l’activité depuis le 17 mars peut avoir modifié les conditions d’intervention. Par exemple, une vérification de mise en service de l’échafaudage est nécessaire afin de vérifier qu’il est toujours adapté et sécurité.

C’est peut-être aussi l’occasion de vérifier que vous disposez bien du dossier de traçabilité amiante, comprenant les rapports de repérage avant travaux, obligatoire depuis le 16 juillet 2019.

3) Appliquer les mesures de sécurité

Ça y est, vous avez obtenu l’accord écrit de chacun de vos clients ; vous avez tout préparé et organisé ! Il va falloir mettre en pratique les mesures préconisées par l’OPPBTP dans son guide.



En premier lieu : éviter le contact avec le virus

En effet, avant d’envoyer vos équipes, refusez l’accès au chantier au personnel susceptible d’être infecté. Pour ce faire, vous pouvez vous appuyez sur le questionnaire de santé proposé par l’OPPBTP. Mais attention à la collecte des données de santé, utilisez le questionnaire plutôt comme moyen d’alerte pour vos salariés.

Si vous intervenez en milieu occupé, il est également primordial de vérifier qu’il n’y a pas d’occupants infectés ou de public « à risque » (voir le communiqué de presse du 17 mars sur www.ameli.fr : « Extension du service aux personnes à risque élevé »). En effet, il est préférable d’éviter les lieux occupés par ce type de personne, mais si votre intervention est vraiment indispensable, il faudra mettre en place une procédure particulière.



Deuxième temps : limiter les interactions entre les personnes

Les autorités sanitaires ont fixé la distance à respecter à 1 m ; mais il ne faut pas hésiter à élargir ces distances plutôt à 1,5 m voire 2 m. Dans certains pays, ce sont ces écarts qui ont été préconisées. En effet, des études montrent que les projections sont importantes en particulier lors de la toux ou de l’éternuement, à l’origine de la transmission.

Il faut donc veiller à respecter cette distanciation sociale pendant les périodes à risque, tout particulièrement pendant le transport pour venir sur chantier, dans la base vie en réduisant la capacité d’accueil, en définissant des ordres de passage ; sur les zones de travaux (type échafaudage, nacelle, etc.). Utilisez un marquage pour faciliter la visualisation de distance à respecter.

Troisième temps : éviter la transmission indirecte du virus

L’eau et le savon constituent le meilleur moyen de « tuer » le virus (voir article dédié sur Futura Sciences : https://www.futura-sciences.com/sante/questions-reponses/coronavirus-savon-il-efficace-coronavirus-13402). Il est donc primordial de mettre à disposition des points d’eau pour que vos équipes puissent se laver les mains, au moins toutes les deux heures et prévoyez en complément des distributeurs de gel hydroalcoolique près des surfaces de contact : poignées de portes, rampes d’escaliers, en haut et en bas de l’échafaudage.

Il est également important de procéder à un nettoyage / désinfection très régulier des lieux de vie, des installations de décontamination pour les opérations en présence d’amiante, des outils partagés, des engins et véhicules au niveau des zones de contact.

L’hygiène et l’entretien sont les meilleures armes contre le Coronavirus !

Quatrième temps : après la protection collective, les Équipements de Protection Individuelle

N’oubliez pas que, Coronavirus ou pas, vous êtes sur un chantier qui présente des risques et sur lequel le port des EPI est indispensable. Nous ne reviendrons donc pas sur ceux-ci.

En fonction de l’évaluation des risques faite, vous aurez décidé de mettre en place ou non des EPI complémentaires. En effet, si la distanciation sociale peut être assurée en permanence, vous pouvez prévoir de ne pas porter de masques et de lunettes. Quant aux gants, il n’est pas non plus recommandé d’en mettre tout le temps, bien au contraire car ils peuvent être à l’origine de contamination.

Les vêtements de travail doivent être nettoyés régulièrement à 60°C ; et le port d’une combinaison peut s’avérer nécessaire pour les interventions chez une personne malade.

Toutefois, trois situations vous amèneront à mettre en place le masque :

  • Intervention à moins d’un mètre d’une autre personne
  • Intervention chez une personne malade
  • Intervention chez une personne « à risque »

Enfin, les déchets (qu’ils s’agissent de masques souillés, de lingettes ayant servies au nettoyage et à la désinfection, etc.) devront être emballés séparément, de préférence en double sac avec une fermeture hermétique. Conservez les déchets pendant 24H bien emballés avant de les évacuer dans les ordures ménagères.

 

4) Former et contrôler vos collaborateurs

Dans le cadre de ce nouveau risque et de votre décision ou non de faire porter le masque, vous devez mettre en place une formation adaptée. Vous devrez notamment :

  • Faire appliquer des consignes d’utilisation des EPI et veiller à leur bonne compréhension par vos équipes ;
  • Mettre en place des méthodologies spécifiques dans vos PPSPS

Pour la rédaction de vos procédures et documentations, vous devrez vous appuyer sur le Référent Covid-19 que vous aurez désigné dans votre entreprise. À ce stade, on peut parler d’un rôle de référent technique. En complément, vous devrez avoir sur tous vos chantiers, un référent Covid-19 qui veillera à l’application des mesures au quotidien sur chantier. N’oubliez pas de vous assurer de la compétence et de l’autorité de ces référents !

Le référent Covid-19 du maître d’ouvrage viendra en appui, comme chef d’orchestre sur le chantier, pour veiller à la cohérence des mesures.

Enfin, toutes ces actions doivent être tracées, au quotidien. Il y a fort à parier que des contentieux vont se créer sur le sujet, et protéger la sécurité de l’employeur est donc nécessaire.

Nos derniers articles

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *