Mesures d’empoussièrement et contrôles de VLEP : enjeux de la directive Européenne amiante
Mesures d’empoussièrement, contrôles de VLEP : enjeux de la directive Européenne amiante et contexte en France
Aujourd’hui, la Commission Européenne se pose la question de l’abaissement de la VLEP à 1 fibre par litre. Il est donc intéressant de comprendre la manière dont les niveaux d’empoussièrement sont évalués en France.
En effet, rappelons que le calcul de l’exposition journalière de chaque travailleur se fait à partir de :
- Mesures sur opérateur ;
- Facteurs de protection des appareils de protection respiratoires ;
- La durée de mise en œuvre des processus.
Ce calcul permet de s’assurer que la Valeur Limite d’Exposition Journalière (VLEP) de 10 fibres par litre sur 8H est bien respectée.
directive européenne amiante : Genèse de la réglementation française imposant la meta
Vous le savez peut-être déjà, mais un changement réglementaire significatif a eu lieu en France en 2012.
Auparavant, les analyses d’air étaient pratiquées selon la méthode MOCP (Microscope Optique à Contraste de Phase).
Grâce à cette technique microscopique, le laboratoire pouvait dénombrer les fibres de format plus important, les fibres dites « OMS ». Il est question de fibres dont la longueur est supérieure à 5 µm, dont le diamètre est inférieur à 3 µm et le rapport longueur sur diamètre supérieur à 3.
Cependant, les fibres de largeur inférieure à 0,2 µm ne peuvent pas être observées par cette méthode. A noter que les fibres d’amiante les plus fines ont une largeur de l’ordre de 0,02 µm (elles sont appelées fibres fines d’amiante, FFA). De plus, le dénombrement de ces fibres se faisait sans distinction de la nature des fibres.
Pourtant, en 2009, l’ANSES a rendu un rapport mettant en avant la toxicité des fibres fines d’amiante (FFA). Concernant les fibres courtes d’amiante (FCA), l’avis indiquait que leur toxicité ne pouvait être exclue. Pour autant, les fibres courtes ne sont pas prises en compte dans la réglementation actuelle.
Mise en place de la meta
Prenant conscience des limites de la MOCP, la Direction Générale du Travail a décidé de lancer une grande campagne d’analyses dans la foulée de cet avis. Globalement, l’objectif est alors de mesurer par Microscopie Electronique à Transmission Analytique les niveaux d’empoussièrement sur les opérations de désamiantage. Grâce à cette vaste campagne, les pouvoirs publics se sont rendu compte qu’il n’y avait pas de corrélation entre les méthodes de mesure par MOCP et META.
En effet, le nombre de fibres courtes est très majoritaires par rapport aux autres fibres alors que les FFA sont globalement en proportion équivalente aux fibres dites « OMS ».
Ainsi, cette campagne a surtout mis en avant que les niveaux d’empoussièrement étaient largement sous-estimés. C’est en particulier le cas pour les processus les plus empoussiérant. Par ailleurs, cela a permis de constater que, par conséquent, la protection des travailleurs n’était pas adaptée.
Directive Européenne amiante : éléments de comparaison entre les différentes méthodes d’analyse de l’empoussièrement sur opérateur
D’ailleurs, dans certains pays européens, on utilise une troisième technique : l’analyse au microscope électronique à balayage analytique (MEBA). Comme avec la META, la MEBA, si tant est qu’elle soit en haute résolution, permet d’identifier les fibres « OMS » et les fibres fines d’amiante (FFA).
Toutefois, l’analyse au MEBA ne permet pas de caractériser la structure cristalline des fibres. De ce fait, elle ne permet pas d’identifier totalement le type de fibres. Pour finir, en haute résolution, son utilisation « en routine » n’est pas possible.
Ainsi, lors de la refonte de la réglementation française en 2012, il a donc été décidé d’imposer la META pour contrôler les niveaux d’empoussièrement et la vérification des expositions.
directive européenne amiante : Les limites de l’utilisation de cette donnée pour mesurer l’exposition professionnelle
Il est à noter que toute la réglementation française repose sur cette évaluation des niveaux d’empoussièrement.
En effet, l’entreprise, en fonction des mesures sur opérateur réalisées au cours de chantier test ou de validation, va évaluer la mise en œuvre du processus. Aussi, cela permet d’évaluer les risques et de classer le processus dans l’un des trois niveaux d’empoussièrement.
En fonction de ces niveaux, le législateur a pris des moyens de protection collective et individuelle plus ou moins importants. Certes, les résultats d’analyse sont théoriquement plus précis en META qu’ils ne l’étaient en MOCP. Toutefois, la qualité et la représentativité de ces mesures sur opérateur sont primordiales.
Cependant, on constate, après dix ans d’application de cette règlementation, que ces mesures dites représentatives ne le sont pas forcément. Ainsi, de nombreux facteurs peuvent influencer le résultat de la concentration :
- Les données très imprécises issues des repérages avant travaux ;
- Le contexte des travaux (par exemple le support sur lequel se trouve le matériau, son état de dégradation, son accessibilité) ;
- Le facteur humain ;
- Etc.
En bref, baser toute l’évaluation des risques et le contrôle du respect de la VLEP sur des mesures réalisées dans des conditions maîtrisées, de courte durée, présente donc des limites que le législateur français n’avait peut-être pas imaginées.